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(première publication en 2004)
Le dernier weekend de novembre, à quelques jours de la Journée mondiale du sida, la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida (COCQ-Sida) organisait à Montréal le premier symposium pour les personnes atteintes du VIH.
Les 376 participants, venus de partout au Québec, ont assisté à huit ateliers traitant de questions médicales et six sur les droits fondamentaux. Les sujets comprenaient des problématiques telles que les aspects des soins de fin de vie, les unités de soins palliatifs et le service de soutien aux proches des patients ainsi que la question de l’euthanasie et du suicide assisté. Il a été clairement démontré que, malgré l’existence de la trithérapie, la vie des gens atteints du VIH n’a rien d’ordinaire.

Les gens atteints du VIH doivent faire face à plusieurs complications dans leur vie de tous les jours : lorsqu’ils veulent trouver un emploi, pour leurs assurances et même pour se faire soigner. « Plusieurs médecins ont encore peur du sida et ils refusent de nous soigner. Ils nous renvoient constamment à l’urgence, pour éviter de nous examiner, explique Léo-Paul, atteint depuis 18 ans. » Le traitement pour le VIH, qui nécessite l’absorption d’une trentaine de pilules par jour, cause des effets secondaires très graves chez la majorité des patients. La trithérapie entraine différents troubles tels le diabète, une hausse du cholestérol ainsi que des déformations corporelles, sources de grand désespoir.

Un malaise, moins connu, mais bien répandu, est la lipodystrophie. Puisque les médicaments bouleversent le métabolisme des gras, il devient soit quasiment nul chez certaines personnes, leur donnant une apparence squelettique, soit il cause le développement de masses graisseuses à l’intérieur des organes ou à l’arrière du cou, causant des difficultés respiratoires. Sur 4 000 personnes sous traitement antirétroviral au Québec, près de 50 % vont développer cette maladie. Certains, de façon très sévère.
La plupart des patients atteints de lipodystrophie sont trop faibles pour lutter pour leurs droits. Mais certains ont réussi à créer une association.  « Il existe malheureusement une énorme protection envers les compagnies pharmaceutiques, explique Martin, porte-parole du comité Lipo-Action. Nous ne voulons pas faire d’alarmisme chez les patients, nous revendiquons simplement notre droit à des soins appropriés. Si les médecins faisaient le dosage plasmatique avant de prescrire les médicaments, il y aurait des effets secondaires moins importants », ajoute-t-il.

Les essais cliniques sont faits sur un groupe d’hommes, ce qui explique que les effets secondaires soient encore plus graves chez les femmes. « Il y a très peu de médecins qui traitent le VIH et, malheureusement, ils ne réussissent pas à faire un suivi approprié. Les conséquences sont graves. Sur 186 patients victimes de lipodystrophie, 15 % ont déclaré arrêter le traitement de manière sporadique. Il faut agir au plus vite. Depuis 6 ans déjà, on connait des cas sévères de lipodystrophie et rien n’a encore été fait », ajoute-t-il.

Ce problème est ignoré par le système de santé, et les soins deviennent très couteux, plusieurs milliers de dollars pour un traitement d’injections, illégal au Canada, qui fait disparaitre les joues creuses pour une année. « Certains vendent leur maison pour se payer un traitement, des gens perdent leur job ou sont rétrogradés à cause de leur apparence. Il est urgent de faire de la recherche. On veut avoir accès à des traitements avec des effets secondaires moins terribles. Si on est obligés de se cacher du monde, on ne pourra pas guérir », explique Lyse Pineault, directrice générale de la COCQ-Sida. Léo-Paul ne peut plus travailler depuis 10 ans : « Ma thérapie me donne des troubles cardiaques, le diabète et des difficultés de digestion qui m’empêchent de travailler pendant plus de trois heures. Je fais tout de même du bénévolat dans les associations. Je me demande parfois si mon médecin a prolongé ma vie ou ma mort. »

World Aids Day